L’exil à Sainte-Hélène : une captivité sous surveillance
La chute de l’Empire et l’ultime abdication
Après la défaite de Waterloo le 18 juin 1815, Napoléon abdique une seconde fois le 22 juin. Refusant de fuir, il se rend aux Anglais, espérant trouver asile. Mais ces derniers, craignant un retour, décident de l’envoyer loin de l’Europe : sur l’île de Sainte-Hélène, une île volcanique isolée à plus de 1 800 km des côtes africaines.
Une prison naturelle dans l’océan
Sainte-Hélène est un lieu de détention redoutable. Sa position, battue par les vents, en fait une forteresse idéale. Napoléon y arrive en octobre 1815 à bord du navire Northumberland. Il est installé à Longwood House, une demeure austère et humide, peu adaptée à son état de santé.
La vie quotidienne de l’Empereur en exil
Un cercle restreint de fidèles
Napoléon est accompagné de quelques proches :
-
Le général Bertrand
-
Le comte de Montholon
-
Le général Gourgaud
-
Le valet Marchand
-
Et quelques domestiques
Ce microcosme devient une cour impériale miniature, où l’on continue de l’appeler "Sire" ou "Majesté".
Une routine morose et des tensions constantes
La vie à Longwood est rythmée par les promenades, les lectures, les dictées de mémoires. Napoléon dicte notamment ses souvenirs à ses compagnons, cherchant à façonner sa postérité.
Mais les relations sont tendues, y compris entre ses fidèles. L’atmosphère est pesante, marquée par l’ennui, la nostalgie, et la surveillance constante du gouverneur britannique Hudson Lowe, que Napoléon méprise ouvertement.
La dégradation progressive de sa santé
Une santé déclinante
À partir de 1818, la santé de Napoléon se détériore. Il souffre de douleurs abdominales, d’insomnies, de dépression. Il prend du poids, se plaint de fièvre et de fatigue chronique.
La maladie fatale : cancer ou empoisonnement ?
L’autopsie réalisée par les médecins britanniques évoque un cancer de l’estomac, comme son père avant lui. Mais depuis le XIXe siècle, certaines théories avancent l’hypothèse d’un empoisonnement à l’arsenic, en raison de la présence suspecte de cette substance retrouvée dans ses cheveux lors d’analyses ultérieures.
Toutefois, la thèse du cancer reste aujourd’hui la plus largement acceptée par les historiens et les médecins.
Le 5 mai 1821 : la mort de Napoléon
Ses derniers instants
Les derniers jours de Napoléon sont marqués par l’agonie. Entouré de ses proches, il alterne phases de délire et lucidité. Le 5 mai, il prononce ses derniers mots :
« France, armée, tête de l’armée, Joséphine… »
Il s’éteint à 17h49, à l’âge de 51 ans. Sa mort est annoncée par des salves de canons et plonge l’île dans un profond silence. Pour ses compagnons, le deuil est immense. Pour le monde, c’est la disparition d’un homme qui a marqué son époque comme peu d’autres.
L’inhumation et le retour des cendres
Enterré à Sainte-Hélène
Conformément aux instructions britanniques, Napoléon est enterré dans la vallée du Géranium, sous un simple tombeau sans nom. Hudson Lowe refuse d’y inscrire « Napoléon Ier », ne reconnaissant pas son titre impérial. La tombe ne portera que : "Napoleon".
Le retour des cendres en France (1840)
En 1840, sous le règne de Louis-Philippe, le roi autorise le rapatriement des cendres de Napoléon. Cette opération, baptisée le "retour des cendres", donne lieu à une cérémonie grandiose. Les restes de l’Empereur sont transférés aux Invalides à Paris, où ils reposent depuis, sous le dôme majestueux.
Une mort qui a nourri la légende
Napoléon, figure du martyr en exil
La solitude, l’éloignement, la surveillance : tous les éléments sont réunis pour faire de Napoléon un martyr romantique. Dans toute l’Europe, les esprits s’enflamment. Les artistes, écrivains et penseurs s’emparent du mythe :
-
Victor Hugo évoque "le géant déchu"
-
Chateaubriand écrit Mémoires d’outre-tombe et dépeint un Napoléon tragique
-
Le peintre Delaroche illustre son exil et sa mort
Une fin à la hauteur de son destin
Loin des batailles, c’est dans l’abandon que Napoléon conclut sa vie. Cette mort dramatique accentue encore la dimension légendaire de son personnage. En France comme ailleurs, il devient à la fois héros, tyran, prophète, chef d’armée, victime… Une figure complexe, insaisissable, mais éternelle.
Sainte-Hélène, une île devenue lieu de pèlerinage
Aujourd’hui, l’île de Sainte-Hélène reste un haut lieu de mémoire napoléonienne. La maison de Longwood a été restaurée, la tombe préservée. Des passionnés s’y rendent chaque année pour honorer l’homme qui bouleversa l’Europe. La Fondation Napoléon œuvre pour entretenir cette mémoire, entre histoire et légende.
Une fin solitaire pour un homme d’histoire
Le 5 mai 1821, Napoléon s’éteint dans l’isolement et la maladie, à des milliers de kilomètres de la France qu’il avait tant marquée. Mais sa mort ne met pas un terme à son influence. Elle amorce au contraire la construction d’un mythe qui traversera les siècles. D’Ajaccio à Austerlitz, de Moscou à Sainte-Hélène, Napoléon reste une figure emblématique de l’histoire mondiale, autant admirée que contestée. Sa fin tragique n’a fait que renforcer l’aura d’un homme que la postérité n’a jamais oublié.